RECHERCHES SUR MOLIERE.                        85
riches étoffes, les meubles magnifiques destis à cet appar­tement allaient être inventoriés avant qu'on eût achevé de les compléter et de les mettre en place.
On s'étonnera peut-être de rencontrer un si grand luxe chez Molière, mais en cela il se conformait au goût régnant; peut-être aussi suivait-il une inclination naturelle qu'il tenait de sa mère ; enfin, si Ton s'en rapporte à Grimarest, Armande Béjard, en épousant Molière, avait cru « être au rang d'une duchesse. » Le Boulanger de Chalussay n'était pas mal ren­seigné sur l'inrieur de Molière, lorsqu'en plaçant la pre­mière scène de sa comédie « dans la chambre d'Élomire, qur doit étre fort parée, » il faisait dire à Molière :
....Nous verrions-nous une chambre si belle : Ces meubles précieux sous de si beaux lambris, Ces lustres éclatants T ces cabinets de prix, Ces miroirs, ces tableaux, cette tapisserie, Qui seule épuisa Tart de la Savonnerie; Enfin tous ces bijoux qui te charment les yeux, Sans ce divin talent seroient-ils en ces lieux?l.
Ces vers de l'envieux auteur d'Elomire hypocondre sont en partie justifiés par la suite de notre inventaire où l'on retrouve les meubles précieux, les cabinets, les miroirs, les tableaux, les tapisseries reprochés à Molière.
En cherchant à se rendre compte de l'ameublement pro­jeté pour le premier étage de l'appartement de la rue Riche­lieu, on est conduit à penser que cet appartement devait se composer de deux chambres à coucher, l'une pour Molière, l'autre pour sa femme, et de plusieurs autres pièces servant de salons et de salle à manger. On doit rassembler, comme devant faire partie de la chambre de Molière, les meubles en bois doré « à pieds d'aiglon feints de bronze » et recouverts d'étoffes où les couleurs dominantes sont le vert et l'aurore. Ces meubles sont d'abord, le lit « à pieds d'aiglon feints de bronze » avec dossier peint et doré, surmonté d'un dôme
1. Élomire hypocondre ou les Médecins vengés, 1670, in-12, acte Ier, scène r-, page 8.